Conférence de presse donnée par le Ministre des Affaires étrangères Qin Gang sur la politique étrangère et les relations extérieures de la Chine

2023-03-07 22:00

Le 7 mars 2023, le Ministre des Affaires étrangères Qin Gang a donné une conférence de presse à l’occasion de la première session de la 14e Assemblée populaire nationale (APN) au Media Center Hotel et répondu aux questions de journalistes chinois et étrangers sur la politique étrangère et les relations extérieures de la Chine.

Chers amis de la presse, bonjour. C’est un grand plaisir pour moi de me retrouver avec vous. Le monde d’aujourd’hui traverse des changements jamais connus depuis un siècle. La Chine poursuivra résolument la politique étrangère d’indépendance et de paix et la stratégie d’ouverture mutuellement bénéfique, et restera engagée pour bâtir la paix mondiale, contribuer au développement dans le monde et défendre l’ordre international.

Maintenant, je suis prêt à répondre à vos questions. 

CCTV : On a pour la diplomatie chinoise de fortes attentes dans le pays comme à l’étranger. Quels seront les priorités et les temps forts de la diplomatie chinoise en 2023, notamment de la diplomatie de Chef d’État ? En tant que nouveau Ministre des Affaires étrangères, comment envisagez-vous la diplomatie chinoise pour les années à venir ?

Qin Gang : Cette année marque le début de la mise en œuvre sur tous les plans de l’esprit du XXe Congrès national du Parti communiste chinois (PCC). Le XXe Congrès du PCC a fait une planification globale pour la diplomatie chinoise, précisé les missions et tâches à accomplir et pris des dispositions stratégiques. Actuellement, la situation sanitaire s’est améliorée dans le pays, et les échanges avec l’extérieur reprennent en bon ordre. Nous avons appuyé sur l’accélérateur et sonné le rassemblement pour la diplomatie chinoise. 

Nous valoriserons le rôle d’orientation de la diplomatie de Chef d’État et mettrons tout en œuvre pour faire réussir en particulier le premier Sommet Chine-Asie centrale et le troisième Forum « la Ceinture et la Route » pour la coopération internationale, deux grands événements que la Chine organisera pour faire connaître les caractéristiques spécifiques de la diplomatie chinoise.  

Nous remplirons la mission de défendre les intérêts vitaux du pays, en nous opposant fermement à toutes formes d’hégémonisme et de politique du plus fort, à la mentalité de la guerre froide, à la confrontation des blocs, à l’endiguement et à la répression, et en défendant résolument la souveraineté, la sécurité et les intérêts de développement du pays. 

Nous nous appuierons sur notre réseau de partenariats, et travaillerons à favoriser les concertations et interactions saines entre grands pays, à développer l’amitié et la coopération avec tous les pays, et à promouvoir la construction d’un nouveau type de relations internationales. Notre « cercle d’amis » dans le monde devient plus large, avec de nouveaux amis toujours plus nombreux et de vieux amis plus indéfectibles.

Nous poursuivrons l’objectif de promouvoir l’ouverture et le développement, et mettrons nos actions au service du développement de qualité et de l’ouverture de haut niveau de la Chine. Nous nous opposons au découplage, à la rupture des chaînes et aux sanctions unilatérales, défendons une économie mondiale ouverte et inclusive, et avec de nouveaux progrès de la Chine, apporterons de nouvelles opportunités au monde. 

Nous suivrons le chemin du multilatéralisme, et œuvrerons à bâtir une communauté d’avenir partagé pour l’humanité, à promouvoir la démocratisation des relations internationales, à faire évoluer la gouvernance mondiale dans un sens plus juste et plus raisonnable, et à apporter grâce à la sagesse chinoise davantage de meilleures solutions aux problèmes communs qui se posent à l’humanité. 

Nous travaillerons dans l’esprit de la diplomatie au service du peuple, garderons toujours à l’esprit le bien-être et la sécurité de nos compatriotes en outre-mer, assumerons notre devoir de servir le peuple, renforcerons les services et la protection pour les ressortissants et les établissements chinois à l’étranger, et rendrons les échanges avec l’extérieur plus sûrs et plus faciles. 

Notre monde est loin d’être tranquille. Les instabilités et les transformations s’entremêlent, la solidarité affronte la division, et les opportunités coexistent avec les défis. La diplomatie chinoise sur la nouvelle marche poursuit un voyage de gloire et de rêve, et aussi un voyage contre vents et marées. L’adversité fait la gloire. Sous la ferme direction du Comité central du PCC rassemblé autour du Camarade Xi Jinping, nous traduirons en actes la Pensée Xi Jinping sur la diplomatie, mettrons en œuvre l’esprit du XXe Congrès national du PCC, poursuivrons l’objectif de notre politique étrangère de préserver la paix mondiale et de promouvoir le développement commun, et surmonterons toutes sortes de difficultés avec un sens aigu des responsabilités, pour créer un environnement extérieur favorable à la construction sur tous les plans d’un pays socialiste moderne et écrire un nouveau chapitre de la diplomatie de grand pays à l’ère nouvelle aux caractéristiques chinoises.

Rose al-Yūsuf : Beaucoup de gens estiment que la modernisation à la chinoise offre une nouvelle voie de modernisation aux différents pays et qu’elle est donc inspirante pour les pays du monde, notamment les pays en développement. Que diriez-vous de la signification de la modernisation à la chinoise pour le monde ? 

Qin  Gang : Comme vous l’avez dit, la modernisation à la chinoise est devenue un terme en vogue partout dans le monde. La modernisation d’un pays peuplé de plus de 1,4 milliard d’habitants dans son ensemble sera un exploit sans précédent dans l’histoire de l’humanité et revêt une grande portée mondiale.

La modernisation à la chinoise a permis de régler de nombreux défis pour le développement de la société humaine, de briser le culte selon lequel la modernisation est synonyme de l’occidentalisation, et de créer une nouvelle forme de civilisation humaine. Elle a aussi offert aux différents pays du monde, notamment aux nombreux pays en développement, des inspirations importantes que je résumerais en cinq points :

Premièrement, l’indépendance. Si la modernisation à la chinoise peut aboutir, c’est parce qu’elle se développe sur le sol chinois, qu’elle s’enracine dans la culture chinoise et qu’elle s’adapte aux réalités chinoises. Le succès du développement de la Chine démontre pleinement que chaque pays a parfaitement le droit et la capacité de choisir sa propre voie et de tenir fermement en main son propre destin.

Deuxièmement, la primauté du peuple. La modernisation à la chinoise repose sur la prospérité commune de tout le peuple. Elle permet à la population de s’enrichir sur les plans tant matériel que spirituel. La modernisation ne se met jamais qu’au service d’une minorité de pays ou de personnes. Elle ne signifie pas l’enrichissement des riches ou l’appauvrissement des pauvres. Elle n’a rien à voir avec la vacuité spirituelle, l’immoralité et le désordre. Chaque peuple doit avoir un accès égal au développement et le droit de chercher le bonheur.

Troisièmement, le développement pacifique. La modernisation à la chinoise ne se réalise ni par la guerre, ni par la colonisation, ni par le pillage. Nous nous tenons à la paix, au développement, à la coopération et au gagnant-gagnant, et recherchons l’harmonie entre l’homme et la nature. C’est une voie de modernisation toute nouvelle et différente de celle de l’Occident.

Quatrièmement, l’ouverture et l’inclusion. Dans la modernisation de l’humanité, le narcissisme est à rejeter et la diversité, à encourager. Nous devons respecter le choix de chaque pays de suivre une voie de développement adaptée à ses réalités nationales, nous inspirer mutuellement et contribuer au succès des uns et des autres.

Cinquièmement, la lutte solidaire. Les expériences réussies du développement de la Chine démontrent pleinement qu’un tas de sable croulant ne tiendra pas et que seule la lutte solidaire permet de générer la force. Il faut persévérer dans l’effort jusqu’à la réalisation des objectifs. Si l’on s’enlisait dans les conflits partisans, parlait sans jamais agir et revenait facilement sur les décisions prises, comme c’est le cas dans certains pays, tout plan, aussi beau soit-il, ne serait que des consolations imaginaires et des illusions.

La modernisation à la chinoise permet d’accroître la force pour la paix, la justice et le progrès dans le monde. Nous espérons, et nous en sommes convaincus, que de plus en plus de pays s’engageront dans la voie de la modernisation et que le rêve de la communauté d’avenir partagé pour l’humanité deviendra réalité.

TASS : À votre avis, dans quelle direction se développeront les relations entre la Russie et la Chine ? Peuvent-elles servir de nouveau modèle aux relations interétatiques ? Le Président chinois se rendra-t-il en Russie après les sessions parlementaires annuelles ? Sera-t-il possible que les deux pays abandonnent le dollar américain ou l’euro dans leurs futurs échanges commerciaux ?

Qin Gang : Vous avez évoqué la question du modèle des relations entre grands pays et c’est un bon angle de vue pour observer les relations sino-russes. Dans les échanges entre grands pays, faut-il pratiquer la politique des blocs exclusifs, ou faire valoir l’honnêteté et la grandeur d’esprit ? La Chine et la Russie ont trouvé avec succès une voie de coexistence entre grands pays marquée par la confiance stratégique mutuelle et le bon voisinage, et donné l’exemple d’un nouveau type de relations internationales.

Certains pays qui ont l’habitude de percevoir les relations sino-russes à travers le prisme des alliances de la guerre froide ne voient que les reflets d’eux-mêmes. Les relations sino-russes se fondent sur le non-alignement et la non-confrontation et ne visent aucune tierce partie. Elles ne sont une menace pour aucun pays dans le monde, ni ne se soumettent à la perturbation ou à l’instigation d’aucune tierce partie. La coopération entre la Chine et la Russie est une impulsion à l’avènement d’un monde multipolaire et à la démocratisation des relations internationales, de même qu’une garantie pour l’équilibre et la stabilité stratégiques dans le monde. Plus le monde est instable, plus les relations sino-russes doivent aller solidement de l’avant.

Les échanges entre les Chefs d’État sont la boussole et le point de repère des relations sino-russes. Nous sommes convaincus que sous le pilotage stratégique des deux Chefs d’État, le partenariat de coordination stratégique global sino-russe à l’ère nouvelle continuera de progresser à un niveau plus élevé.

S’agissant de votre question sur les monnaies à utiliser dans le commerce sino-russe, la réponse est simple. Toutes les monnaies sont envisageables, pourvu qu’elles soient bonnes, sûres et crédibles. Les devises internationales ne doivent pas être une carte maîtresse pour les sanctions unilatérales, encore moins un synonyme d’intimidation et de coercition.

Quotidien du Peuple : L’Initiative pour le développement mondial et l’Initiative pour la sécurité mondiale avancées par le Président Xi Jinping sont largement saluées par différents pays. Quel est le rôle que la Chine entend jouer dans le renforcement et le perfectionnement de la gouvernance mondiale ? Quelles sont les mesures qu’elle prendra à cet égard ?

Qin Gang : Le monde d’aujourd’hui est changeant et instable. Qu’est-ce qui y est arrivé ? Que devons-nous faire ? L’humanité se trouve encore une fois à la croisée des chemins de l’Histoire. Le Président Xi Jinping a montré, avec une vision du monde, de l’Histoire et de l’humanité, la bonne voie à suivre pour la gouvernance mondiale. Depuis l’entrée de la Chine dans la nouvelle ère il y a dix ans, le Président Xi Jinping a avancé une série d’initiatives et de propositions majeures, comme la construction d’une communauté d’avenir partagé pour l’humanité, la coopération dans le cadre de l’Initiative « la Ceinture et la Route », les valeurs communes de l’humanité, l’Initiative pour le développement mondial et l’Initiative pour la sécurité mondiale. Ces initiatives portent une idée centrale : tous les pays du monde sont interdépendants, tous les êtres humains partagent un avenir commun, et la communauté internationale a besoin de la solidarité et de la coopération. La solidarité et la coopération permettent de vaincre la COVID-19, de relever le défi climatique, de régler les déficits de paix, de sécurité, de développement et de gouvernance, et de construire un monde de paix durable, de sécurité universelle, de prospérité commune, ouvert, inclusif, propre et beau. 

Le chemin de la gouvernance mondiale n’est pas sans embûches. Comme le disent de vieux adages chinois : « La fraternité conduit à la paix et la haine provoque le chaos », ou bien « Gouverner selon la volonté égoïste entraîne le chaos, gouverner en vertu de la loi apporte la paix ». La vieille sagesse nous enseigne : dans la gouvernance mondiale, il faut respecter le droit et observer l’esprit du droit international incarné par la Charte des Nations Unies ; il faut défendre l’équité et la justice et rejeter l’hégémonisme et les intérêts égoïstes ; il faut rester solidaire et renoncer à la division et à la confrontation. Les pays en développement représentent plus de 80% de la population mondiale et contribuent à plus de 70% à la croissance mondiale. Leurs peuples ont droit à une vie meilleure, et ces pays doivent également jouir d’une représentation et d’un droit à la parole plus grands dans les affaires internationales.

« La Grande Voie mène au plus grand bien de tous. » La Chine poursuivra toujours une vision mondiale, prendra une part active au processus de la gouvernance mondiale, et apportera une plus grande contribution à la paix et au développement dans le monde ainsi qu’au progrès de l’humanité.

NBC : Vous avez écrit dans une tribune : « L’avenir des peuples chinois et américain, en effet, celui de toute la planète, dépend d’une relation sino-américaine saine et stable. » Une relation saine et stable est-elle encore possible vu que les conflits d’intérêts entre la Chine et les États-Unis s’accentuent ? Qu’envisagez-vous de faire pour la rendre possible ? À part les intérêts vitaux de la Chine, avez-vous pensé à ceux des États-Unis ? 

Qin Gang : Il y a eu récemment entre la Chine et les États-Unis l’incident de l’aéronef sans pilote. C’est un incident de force majeure purement accidentel et imprévu, dont les faits et la nature sont très clairs. Même la partie américaine estime qu’il ne constitue pas de menaces réelles. Pourtant, la partie américaine, en violant l’esprit du droit international et l’usage international et dans une logique de présomption de culpabilité, a surréagi et abusé de la force. Elle l’a exploité pour en faire une crise diplomatique qui aurait pu être évitée. 

Dans l’imprévisible, il y a toujours du prévisible. C’est qu’il existe une grande déviation des États-Unis concernant comment ils perçoivent et décrivent la Chine. En la définissant comme le rival principal et le plus sérieux défi géopolitique, ils ont commis une erreur dès le départ, ce qui fait que leur politique chinoise a complètement dévié de la bonne voie, celle d’une politique raisonnable et saine.

La partie américaine prétend qu’elle « cherche à gagner la concurrence avec la Chine mais ne veut pas de conflits avec elle ». Mais la « concurrence » telle qu’elle prône vise en réalité à contenir et à endiguer la Chine sur tous les plans et n’est rien d’autre qu’un jeu à somme nulle où il n’y a qu’un seul gagnant. La partie américaine ne cesse de dire qu’il faut respecter les règles. Mais, comme dans une course olympique entre deux athlètes, lorsque l’un, au lieu de donner le meilleur de lui-même, cherche tout le temps à faire trébucher l’autre, voire même à le blesser, ce n’est en aucun cas une compétition loyale, mais bien une confrontation malveillante. Faute ! La version américaine de « mise en place de garde-fous » dans les relations sino-américaines et de « non-conflit » est en réalité de demander à la Chine d’endurer les coups et les accusations. Ce n’est absolument pas possible. Si la partie américaine ne donne pas un coup de frein et continue de foncer sur la voie erronée, les « garde-fous », aussi nombreux soient-ils, ne pourront empêcher un déraillement, et il y aura inévitablement des conflits et affrontements. Qui pourrait en supporter les conséquences désastreuses ? Une telle concurrence est un jeu dangereux qui met en péril les intérêts fondamentaux des deux peuples, voire l’avenir de toute l’humanité. Nous nous y opposons fermement. Les États-Unis ont l’ambition de retrouver leur grandeur, ils doivent aussi avoir la largeur d’esprit d’accepter le développement des autres. L’endiguement et la répression ne pourront en aucun cas redonner aux États-Unis leur grandeur, ni empêcher la nation chinoise de réaliser son renouveau. 

Comme l’a indiqué le Président Xi Jinping, la gestion par la Chine et les États-Unis de leurs relations met en jeu l’avenir du monde. Bien gérer les relations sino-américaines n’est pas une option, mais un impératif. J’ai noté qu’aux États-Unis, de plus en plus de personnalités clairvoyantes s’inquiètent profondément de l’état actuel des relations sino-américaines, et appellent la partie américaine à adopter une politique rationnelle et pragmatique à l’égard de la Chine. 

Le peuple américain, tout comme le peuple chinois, est chaleureux, amical et sincère, et souhaite avoir une vie meilleure dans un monde meilleur. Je me rappelle que lorsque j’étais aux États-Unis, des dockers américains au port Long Beach à Los Angeles m’ont dit que la vie de toutes leurs familles dépendait du commerce de marchandises avec la Chine et qu’ils voulaient voir la prospérité commune des deux pays. Des agriculteurs de l’Iowa m’ont dit qu’il y avait beaucoup de gens qui souffraient encore de la faim dans le monde et qu’ils voulaient produire plus de céréales. Des recteurs d’universités m’ont dit que le progrès technologique nécessitait des échanges internationaux et qu’un découplage ne ferait que des perdants. Une écolière de l’Académie Yinghua au Minnesota, qui a remporté le concours mondial Chinese Bridge pour les élèves de l’école primaire, m’a dit dans un mandarin impeccable qu’elle apprenait la langue chinoise parce qu’elle aimait la Chine. 

Chaque fois que je pense à eux, je me dis que ce qui détermine les relations sino-américaines, ce sont les intérêts communs et les responsabilités partagées des deux pays et l’amitié entre les deux peuples, et non la politique intérieure des États-Unis ou un néo-maccarthysme hystérique. 

La Chine poursuivra toujours le principe du respect mutuel, de la coexistence pacifique et de la coopération gagnant-gagnant avancé par le Président Xi Jinping, et travaillera à un développement sain et stable des relations sino-américaines. Nous espérons que l’administration américaine pourra écouter attentivement la voix des deux peuples, dissiper son anxiété stratégique fondée sur une « inflation de la menace », rejeter la logique de la guerre froide marquée par le « jeu à somme nulle », refuser d’être inutilement prise en otage par le « politiquement correct », honorer ses engagements et travailler dans la même direction avec la partie chinoise en vue de trouver ensemble une bonne voie de coexistence entre la Chine et les États-Unis au bénéfice des deux pays et du monde. 

Phoenix TV : Des think-tanks et des officiels américains ont fait du tapage autour d’un éventuel conflit entre la Chine et les États-Unis en 2027 ou 2025 à cause de la question de Taiwan. Des médias disent même que les États-Unis ont déjà élaboré un plan pour la « destruction de Taiwan ». Comment voyez-vous la situation actuelle dans le Détroit de Taiwan ? À votre avis, quelle est la probabilité d’un conflit sino-américain dans le détroit ?

Qin Gang : Je savais que la question de Taiwan serait évoquée aujourd’hui. J’ai apporté la Constitution de la République populaire de Chine. Je voudrais commencer par citer le préambule de la Constitution : « Taiwan fait partie du territoire sacré de la République populaire de Chine. Réaliser la réunification de la patrie est une responsabilité sacrée du peuple chinois tout entier, y compris nos compatriotes de Taiwan. » La résolution de la question de Taiwan est l’affaire du peuple chinois seul, et aucun pays étranger n’a le droit de s’y ingérer. Ces derniers temps, un officiel américain de haut rang prétend que la question de Taiwan n’est pas une affaire intérieure de la Chine. Nous nous y opposons fermement et y restons hautement vigilants.

Pour les compatriotes des deux rives du détroit, nous avons une seule et même famille qui s’appelle la Chine. Unis par des liens de chair, nous continuerons de faire preuve de la plus grande sincérité et de déployer le maximum d’efforts pour réaliser la réunification pacifique de la patrie. Dans le même temps, nous nous réservons l’option de prendre toutes les mesures nécessaires. La Loi anti-sécession de la Chine est très claire là-dessus. En cas de violation de cette loi, nous devrons agir en vertu de la Constitution et de la loi. Personne ne doit sous-estimer la forte détermination, la ferme volonté et la grande capacité du gouvernement et du peuple chinois pour défendre la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays.

La question de Taiwan est au cœur même des intérêts vitaux de la Chine, et constitue le socle du fondement politique des relations sino-américaines et la première ligne rouge à ne pas franchir dans ces relations. Les États-Unis ont une responsabilité irrécusable de l’apparition de cette question. Si nous évoquons la question de Taiwan avec eux, c’est pour leur demander de s’abstenir de s’ingérer dans les affaires intérieures de la Chine. Le peuple chinois a le droit de poser les questions suivantes : Pourquoi la partie américaine prône-t-elle le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale sur la question ukrainienne, alors qu’elle ne respecte pas la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Chine sur la question de Taiwan de la Chine ? Pourquoi demande-t-elle à la Chine de ne pas fournir des armes à la Russie alors qu’elle vend depuis longtemps des armes à Taiwan en violation du Communiqué conjoint sino-américain du 17 août 1982 ? Pourquoi prétend-elle préserver la paix et la stabilité dans la région, alors qu’elle élabore en cachette un plan pour la « destruction de Taiwan » ?

La paix et la stabilité dans le détroit sont inconciliables avec les tentatives sécessionnistes visant l’« indépendance de Taiwan », comme le sont l’eau et le feu. Pour la paix et la stabilité dans le détroit, la menace réelle est les forces sécessionnistes visant l’« indépendance de Taiwan », le stabilisateur clé est le principe d’une seule Chine et les vrais garde-fous sont les trois Communiqués conjoints sino-américains. Une mauvaise gestion de la question de Taiwan ébranlera les fondements des relations sino-américaines. Si la partie américaine souhaite vraiment la paix et la stabilité dans le détroit, elle devra cesser d’utiliser Taiwan pour contenir la Chine, retrouver le sens original et véritable du principe d’une seule Chine, honorer ses engagements politiques pris envers la Chine, et rejeter et stopper sans équivoque l’« indépendance de Taiwan ».

Global Times : Le conflit russo-ukrainien a duré plus d’un an. Ces derniers temps, certains aux États-Unis et dans d’autres pays occidentaux ont demandé à la Chine de ne pas fournir d’assistance létale à la Russie et fait du tapage sur la « responsabilité spéciale de la Chine ». Qu’en pensez-vous ?

Qin Gang : La crise ukrainienne est une tragédie qui aurait pu être évitée. L’évolution de la situation en Ukraine donne des leçons douloureuses qui méritent une réflexion profonde de toutes les parties.

Cette crise a des facteurs historiques et d’actualité complexes. Elle est au fond une explosion des tensions dans la gouvernance sécuritaire européenne. La Chine a toujours fait ses jugements selon la réalité des faits et en toute indépendance. Entre la paix et la guerre, nous avons choisi la paix ; entre le dialogue et les sanctions, nous avons choisi le dialogue ; entre la désescalade et l’escalade, nous avons choisi la désescalade. Ce n’est pas la Chine qui a créé cette crise, et elle n’est pas non plus partie à la crise. Elle n’a fourni d’armes à aucune des parties au conflit. De quel droit rejette-t-on la responsabilité sur la Chine, voire la sanctionne et la menace ? Nous ne l’acceptons pas.

Nous avons publié il y a quelques jours la Position de la Chine sur le règlement politique de la crise ukrainienne dans laquelle nous avons avancé 12 points, comme respect de la souveraineté de tous les pays, rejet de la mentalité de la guerre froide, cessation des hostilités et lancement des pourparlers de paix. L’essentiel, c’est de favoriser la paix et le dialogue.

Mais ce qui est regrettable, c’est que les efforts pour la paix et le dialogue ont été sans cesse compromis. Il semble qu’il existe une main invisible qui incite à la prolongation et à l’escalade du conflit, et qui cherche à mettre la crise ukrainienne au service de certains desseins géopolitiques.

La crise ukrainienne se trouve à un moment critique. Soit on met fin aux hostilités, rétablit la paix et s’engage dans la voie du règlement politique, soit on jette de l’huile sur le feu, amplifie la crise et se dirige vers une situation incontrôlable. Le conflit, les sanctions et la pression n’aident pas à régler les problèmes. Ce dont nous avons besoin, c’est le sang-froid, la raison et le dialogue. Les pourparlers de paix doivent être lancés rapidement, et les préoccupations sécuritaires légitimes de toutes les parties doivent être respectées, pour que soit trouvée une solution permettant de réaliser la paix et la sécurité durables en Europe.

Associated Press of Pakistan : Cette année marque le dixième anniversaire de l’Initiative « la Ceinture et la Route » de la Chine. Ces dernières années, les États-Unis et l’Union européenne ont aussi avancé leurs initiatives d’infrastructures mondiales. Est-ce que vous les voyez comme des initiatives concurrentielles ? Certains disent que l’Initiative « la Ceinture et la Route » pourrait conduire au piège de la dette, comment y répondez-vous ?

Qin Gang : L’Initiative « la Ceinture et la Route » est un bien public de qualité lancé par la Chine, construit par toutes les parties et qui profite au monde entier. Elle est marquée par de hauts standards, une grande soutenabilité et des bénéfices réels pour la population, et doit sa popularité à la qualité et aux résultats concrets de ses projets. Jusqu’ici, plus de trois quarts des pays dans le monde et 32 organisations internationales ont rejoint cette initiative. 

Depuis son lancement il y a dix ans, cette initiative s’est transformée en projets concrets, résultats de développement réels dans différents pays et bénéfices tangibles pour les peuples. En dix ans s’est frayé un chemin radieux du développement commun jalonné de nouveaux symboles nationaux, de projets de bien-être social et de monuments de coopération. En dix ans, cette initiative a permis des investissements de près de 1 000 milliards de dollars américains, donné lieu à plus de 3 000 projets de coopération, créé 420 000 postes d’emploi pour les pays partenaires, et sorti près de 40 millions de personnes de la pauvreté. Le chemin de fer Chine-Laos a permis au Laos de passer d’un pays enclavé à un pays connecté. La centrale de Puttalam au Sri Lanka a alimenté de nombreux foyers en électricité. Le chemin de fer Mombasa-Nairobi a apporté une contribution de plus de deux points de pourcentage à la croissance de l’économie locale. Les Ateliers Luban ont permis à des jeunes de plus de 20 pays d’acquérir des compétences professionnelles. 65 000 convois ont été expédiés jusqu’ici sur les lignes de fret Chine-Europe. Ce sont des « caravanes d’acier » reliant l’Asie et l’Europe et des « trains express » acheminant des matériels anti-COVID. En organisant cette année le troisième Forum « la Ceinture et la Route » pour la coopération internationale, la Chine œuvrera avec les différentes parties concernées pour faire fructifier encore davantage cette initiative.

L’Initiative « la Ceinture et la Route » est une initiative pragmatique et ouverte, guidée par les principes d’amples consultations, de contribution conjointe et de bénéfices partagés. Les consultations sont encouragées dans la coopération, et l’amitié est privilégiée dans les échanges. Quant aux initiatives lancées par d’autres pays, nous les accueillerons favorablement si elles ne sont pas fondées sur le clivage idéologique, et nous serons heureux de voir leur succès si elles ne sont pas motivées par des desseins géopolitiques égoïstes.

Sur le prétendu « piège de la dette », cette étiquette ne peut en aucun cas être collée à la Chine. Selon des statistiques, plus de 80% de dettes souveraines des pays en développement sont détenues par les institutions financières multilatérales et les créanciers commerciaux. C’est là la plus grande source de pression pour les pays en développement sur la question de la dette. Surtout depuis l’année dernière, la hausse par les États-Unis des taux d’intérêt d’une ampleur et d’une vitesse sans précédent a entraîné une sortie massive de capitaux des différents pays, ce qui a encore aggravé la question de la dette des pays concernés.

La Chine travaille depuis toujours à aider les pays concernés à surmonter les difficultés. Elle est le plus grand contributeur à l’Initiative du G20 sur la suspension du service de la dette. La Chine continuera de participer de manière constructive au règlement de la question de la dette dans le monde. Dans le même temps, nous appelons les autres parties à agir conjointement et à partager les charges de manière équitable. Quand les différentes parties se mettent à discuter, il y aura toujours plus de solutions que de difficultés.

NHK : Cette année marque le 45e anniversaire de la signature du Traité de paix et d’amitié entre le Japon et la Chine. Actuellement des divergences visibles existent encore entre les deux parties sur les plans politique, économique et de sécurité. Comment le nouveau gouvernement chinois envisage-t-il de construire les relations avec le Japon ?

Qin Gang : La Chine et le Japon sont deux pays voisins séparés seulement par un bras de mer. Pour construire des relations sino-japonaises de la nouvelle ère, il faut à mon avis travailler sur les points suivants :

Premièrement, honorer les engagements. Il y a 45 ans, les deux pays ont signé le Traité de paix et d’amitié, qui a consacré pour la première fois sur le plan juridique les principes et les orientations à suivre pour le développement des relations sino-japonaises. Ce traité et les trois autres documents politiques sino-japonais constituent le fondement politique des relations bilatérales. Il faut les observer scrupuleusement, en particulier le consensus politique important selon lequel les deux pays sont l’un pour l’autre partenaires, et non menaces. Tout engagement pris doit être traduit en action.

Deuxièmement, tirer les enseignements de l’histoire. Le militarisme japonais a infligé à la nation chinoise de profondes douleurs, qui font toujours mal aujourd’hui. Le peuple chinois ne l’oubliera jamais, et la partie japonaise ne doit pas non plus l’oublier. Oublier l’histoire est une trahison. Dénier un crime signifie la récidive. La Chine fait toujours preuve de bienveillance à l’égard du Japon, espérant vivre en bon voisinage et en amitié avec lui. Or, si certains au Japon, au lieu de chercher la bonne entente avec les pays voisins, agissent à leur détriment, voire participent à une nouvelle guerre froide visant à endiguer la Chine, les relations entre les deux pays souffriront de nouvelles blessures, alors que les anciennes ne se sont pas encore cicatrisées.

Troisièmement, préserver l’ordre. Actuellement, certains dirigeants au Japon parlent beaucoup de l’ordre. Il est donc nécessaire de préciser de quel ordre on parle au fond. L’actuel ordre international est fondé sur la victoire de la guerre mondiale antifasciste obtenue au prix de la vie et du sang de 35 millions de militaires et de civils chinois. Tout révisionnisme historique défiant l’ordre et la justice internationaux de l’après-guerre sera absolument rejeté par le peuple chinois. Le Traité de paix et d’amitié entre la Chine et le Japon affirme explicitement l’opposition à l’hégémonisme, et l’esprit du Traité a toujours le sens d’actualité. 

Quatrièmement, rechercher les bénéfices mutuels. La Chine et le Japon ont des atouts et besoins complémentaires. Nous devons poursuivre les principes du marché et un esprit libre et ouvert pour renforcer la coopération, préserver conjointement la stabilité et le bon fonctionnement des chaînes industrielles et d’approvisionnement et apporter une impulsion et un dynamisme à la reprise de l’économie mondiale.

Je ne saurais terminer sans évoquer une question. Le gouvernement japonais a décidé de déverser dans la mer les eaux contaminées de la centrale nucléaire de Fukushima. Ce n’est pas qu’une affaire privée du Japon, mais un enjeu majeur pour l’environnement des océans et la santé de l’humanité. Nous exhortons la partie japonaise à gérer cette question adéquatement et de manière responsable.

Agence Xinhua : Les États-Unis prétendent vouloir « façonner l’environnement stratégique dans lequel opère la Chine », avec la « stratégie Indopacifique » comme un levier important. Par conséquent, pas mal de pays de la région subissent une grande pression. Selon certains commentaires, avec les pressions baissières croissantes qui pèsent sur l’économie chinoise, il sera peu possible pour les pays de la région de compter sur les États-Unis pour leur sécurité et sur la Chine pour leur économie. Qu’en pensez-vous ?

Qin Gang : Dans leur « stratégie Indopacifique », les États-Unis prônent la liberté et l’ouverture, mais cherchent en réalité à se faire des alliés et à monter de petits cercles exclusifs de toutes sortes. Ils prétendent préserver la sécurité régionale, mais provoquent en réalité des confrontations et cherchent à créer une « version Asie-Pacifique de l’OTAN ». Ils se vantent de promouvoir la prospérité régionale, mais s’acharnent en réalité au découplage et à la rupture des chaînes et compromettent le processus d’intégration régionale.

En déclarant ouvertement vouloir « façonner l’environnement stratégique dans lequel opère la Chine », les États-Unis ont en réalité dévoilé le but réel de leur « stratégie Indopacifique » d’encercler la Chine. Cela ne fera que saboter l’architecture de coopération régionale ouverte, inclusive et centrée sur l’ASEAN et compromettre les intérêts collectifs et de long terme des pays de la région. Ces tentatives mèneront à l’impasse et sont vouées à l’échec.

Ces derniers temps, de nombreux dirigeants des pays de la région ont fait remarquer que l’ASEAN ne devait servir de proxy pour aucune force extérieure ni tomber dans le tourbillon des rivalités entre grands pays. L’Asie doit être une scène de coopération gagnant-gagnant et non un échiquier des jeux géopolitiques. Aucune guerre froide ne doit réapparaître en Asie. La crise à l’ukrainienne ne doit jamais se reproduire en Asie. 

Quant à la question de savoir sur qui on peut compter sur les plans sécuritaire ou économique, je crois qu’il faut avant tout compter sur la solidarité face aux épreuves, sur la recherche d’une sécurité commune et d’un développement partagé, et sur la construction d’une communauté d’avenir partagé encore plus solide avec les pays voisins.

Certains s’inquiètent des perspectives de l’économie chinoise, et ce n’est vraiment pas la peine à mon avis. Des institutions internationales ont récemment révisé à la hausse leurs prévisions de croissance pour l’économie chinoise de cette année. Nous mêmes, nous attendons une croissance d’environ 5%, largement plus élevée que celle des autres principales économies. L’année dernière, les investissements étrangers réellement utilisés en Chine ont augmenté de 8%, et la Chine se trouve au premier rang mondial en termes de volume des investissements attirés. Le Forum chinois sur le développement et la Conférence annuelle du Forum de Boao pour l’Asie se tiendront prochainement. Cette année aura lieu aussi la Réunion annuelle des nouveaux champions à Tianjin. Nombreux sont des entrepreneurs étrangers qui viendront y participer. De mes échanges avec plusieurs de mes homologues de la région, je constate que leur plus grande attente est le développement et que le sujet le plus abordé est la coopération. Je suis convaincu que l’accélération de la promotion du développement de qualité, l’élargissement de l’ouverture de haut niveau et la construction d’une nouvelle dynamique de développement en Chine fourniront certainement de nouvelles opportunités aux autres pays du monde, surtout aux pays de la région.

The Paper : Fin 2022, le Président Xi Jinping a participé au premier Sommet Chine-États arabes et au Sommet Chine-Conseil de coopération du Golfe et effectué une visite d’État en Arabie saoudite. En février dernier, la Chine a accueilli la visite du Président iranien. Cela montre de toute évidence que la Chine accorde une plus grande importance au Moyen-Orient. Quelles seront les priorités de la politique de la Chine à l’égard de cette région ?

Qin Gang : Les relations entre la Chine et les pays du Moyen-Orient remontent loin dans le temps. Nous sommes de bons amis et de bons partenaires. 

Lors du premier Sommet Chine-États arabes tenu fin 2022, les deux parties sont convenues d’un commun accord de déployer tous les efforts pour construire une communauté d’avenir partagé sino-arabe à l’ère nouvelle, donnant une impulsion forte à l’amitié et à la coopération entre la Chine et les pays arabes. Le mois dernier, le Président iranien Ebrahim Raïssi a effectué une visite réussie en Chine. Les deux pays ont décidé unanimement de développer en profondeur le partenariat stratégique global sino-iranien et de porter leurs relations bilatérales à un niveau plus élevé.

La Chine soutient l’indépendance stratégique des pays du Moyen-Orient et s’oppose à l’ingérence des forces extérieures dans les affaires intérieures de ces pays. Elle continuera de défendre la justice et de soutenir les pays du Moyen-Orient dans leurs efforts pour favoriser le règlement politique des points chauds à travers le dialogue et les consultations. La Chine respecte pleinement les pays du Moyen-Orient en tant que maîtres de leurs propres affaires et n’a l’intention ni de combler le prétendu « vide », ni de former de petits cercles exclusifs. Nous voulons être contributeurs à la sécurité et à la stabilité au Moyen-Orient, partenaires pour son développement et sa prospérité et promoteurs de son émergence solidaire.

The Straits Times : Certains voient dans votre nomination au poste de Ministre des Affaires étrangères un signe qui montre que la Chine abandonne la « diplomatie du loup combattant » et adopte une approche plus modérée dans sa diplomatie. La Chine s’est-elle vraiment éloignée de l’étiquette dure qu’on lui avait attribuée ?

Qin Gang : Votre question est très intéressante. Je me souviens qu’à mon arrivée aux États-Unis en tant qu’Ambassadeur de Chine, des médias américains disaient que voilà un « loup combattant chinois ». Maintenant, je suis Ministre des Affaires étrangères, et on ne me donne plus ce surnom. Je me sens un peu déçu. 

La « diplomatie du loup combattant » est en réalité un piège narratif. Quant à ceux qui l’ont créé, soit ils connaissent mal la Chine et la diplomatie chinoise, soit ils ferment les yeux devant les faits et ont des desseins inavouables.

Comme l’a dit Confucius il y a plus de 2 000 ans, « Il faut rendre la bienveillance pour la bienveillance et la justice pour le ressentiment. Si vous rendez la bienveillance pour le ressentiment, que rendrez-vous pour la bienveillance ? » La diplomatie chinoise est bienveillante et amicale. Cependant, quand des loups les bloquent et les attaquent, les diplomates chinois n’ont d’autres choix que de « danser avec les loups » et de défendre la patrie.

AFP : Vu les tensions entre la Chine et les États-Unis ces derniers mois, la Chine envisage-t-elle de renforcer ses liens politique et commercial avec l’Union européenne ?

Qin Gang : La Chine et l’Europe sont deux grandes civilisations, deux grands marchés et deux grandes forces dans le monde. Développer des échanges est un choix qu’elles ont fait en toute indépendance en fonction de leurs intérêts stratégiques respectifs. Les relations sino-européennes ne visent aucune tierce partie, ne se subordonnent à aucune tierce partie, ni ne dépendent d’aucune tierce partie.

Quelle que soit l’évolution de la situation, la Chine considère toujours l’Union européenne comme un partenaire global stratégique et soutient l’intégration européenne. Nous espérons que l’Europe, après avoir vécu les épreuves du conflit en Ukraine, pourra en tirer des leçons et réaliser véritablement une autonomie stratégique et une paix durable.

Nous sommes prêts à travailler avec l’Europe pour porter le véritable multilatéralisme, poursuivre le respect mutuel et la coopération mutuellement bénéfique, et surmonter toutes sortes de perturbations et de difficultés, de sorte à approfondir sans cesse le partenariat global stratégique sino-européen et à injecter plus de stabilités, de certitudes et d’énergies positives à un monde changeant et instable.

China Daily : China Daily a recueilli des questions pour le Ministre des Affaires étrangères. Beaucoup de jeunes ont posé des questions sur l’image de la Chine et son droit à la parole sur la scène internationale. À votre avis, comment peut-on présenter au monde une image réelle, multidimensionnelle et panoramique de la Chine ? Quel rôle les jeunes peuvent-ils jouer pour faire mieux entendre la voix de la Chine ?

Qin Gang : Je voudrais d’abord remercier China Daily d’avoir offert une telle plateforme pour rapprocher la diplomatie chinoise et le public, notamment les jeunes. Je remercie également nos jeunes amis de leur intérêt et de leur soutien à la diplomatie chinoise. C’est une question très pertinente, et je me réjouis de la vision et de la hauteur de vue de notre jeunesse. Un adage chinois dit que chacun voit sa part de responsabilité dans l’avenir du pays. Le Secrétaire général Xi Jinping affirme que la jeunesse représente l’espoir et crée l’avenir, et que les jeunes sont appelés à mettre leur vitalité au service de la construction de la communauté d’avenir partagé pour l’humanité. 

Aujourd’hui, la Chine s’approche de jour en jour du centre de la scène internationale. Il nous arrive plus souvent de devenir « sujet tendance » et d’être regardés de toute part. Mais nous n’avons pas encore assez de microphones, et notre voix n’est pas suffisamment entendue. Sur la scène, il y a encore ceux qui monopolisent le microphone et il y a encore des bruits et des dissonances à l’encontre de la Chine. Augmenter le droit à la parole de la Chine sur la scène internationale, c’est une responsabilité que la jeunesse chinoise doit assumer aujourd’hui.

La jeunesse chinoise doit avoir confiance en soi. La civilisation chinoise cinq fois millénaire et les accomplissements de la modernisation de la Chine sont des sources de confiance en nous-mêmes. J’espère que nos jeunes pourront forger dans la pratique une ambition, une intégrité et une confiance toujours plus grandes et regarder le monde et dialoguer avec lui sur un pied d’égalité, de sorte à présenter la vision de la jeunesse chinoise, à faire entendre ses voix et à montrer son image.

La jeunesse chinoise doit avoir un esprit entreprenant. La réalisation du grand renouveau de la nation chinoise et la construction de la communauté d’avenir partagé pour l’humanité appellent les jeunes à travailler inlassablement pour donner le meilleur d’eux-mêmes. Si la modernisation occidentale est le prélude à la modernisation de l’humanité, le développement et le progrès de la Chine et des autres pays en développement en seront la symphonie, et la recherche du rêve par les jeunes Chinois en sera les notes les plus dynamiques et les plus mélodieuses. 

La jeunesse chinoise doit avoir une ouverture d’esprit et une vision mondiale. Elle doit embrasser le monde pour s’inspirer et s’enrichir, observer le monde de ses propres yeux et raconter la Chine dans son propre langage, en vue de mieux faire connaître au monde la Chine et la culture chinoise.

Je serai heureux de voir plus de jeunes amis nous rejoindre dans la diplomatie chinoise et vivre pleinement leur jeunesse à une ère de transformations.

Avant de lever la séance, le Ministre Qin Gang a adressé, à l’occasion de la Journée internationale des femmes qu’on célébrera demain, ses vœux de bonne fête et de bonheur à toutes les femmes, représentantes à l’APN, membres du Comité national de la CCPPC, journalistes et compatriotes, qui participent aux deux sessions. 

La Conférence de presse a duré une heure et cinquante minutes.

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